Dakota building

Ce matin je suis encore dans mon lit c'est affreux, il est midi moins dix, ou alors midi dix, j'entends ma mère qui chantonne  un vieux truc des Stones. Le rock, c'est le truc de tonton Jacques, alors ma mère a fini par faire comme lui, et ça m'énerve. Oncle Jacques il est super sympa, mais franchement il devrait changer de look. Les santiags à cinquante ans, soit on est Steve Mac Queen, soit on achète des shoes normales. Lorsqu'il pose ses santiags sur la table basse du salon, oncle Jacques parle de New York, du Dakota building (même s'il préfère les Stones, oncle Jacques a une petite faiblesse pour John Lennon), et puis de son road movie à travers les States, comme il dit, lorsqu'il avait vingt ans et qu'il emballait sec, avec son vieux Levi's et sa guitare. J'ai un peu de mal à l'imaginer comme ça, parce qu'avec le bide qu'il a aujourd'hui, y'a longtemps que Jacky (appellation amoureuse de ma tante) ne rentre plus dans son jean. Parfois je me demande si à cinquante ans, moi aussi, je serai en boucle sur les trucs que j'aime maintenant, sur les séries télé, sur Scofield, si je porterai toujours des slims et des converse. Ça me donne un peu le cafard.
Ça me déprime carrément en fait.
Mais les supers héroïnes ne vieillissent pas , c'est bien connu.

Lundi de Pâques

Moi les lapins c'est pas trop mon truc, ni les cloches, ni les oeufs. Or aujourd'hui c'est Lundi de Pâques. Tout est moins marrant le lundi de Pâques. La grasse mat', le shopping (c'est fermé, évidemment), ma mère qui est là, à moitié déprimée, et qui se demande dans quelle expo elle va me traîner, histoire de digérer la journée. Sonia et les autres, elles sont toutes avec leurs parents, à se gaver de mauvais chocolat. Heureusement il y a Johnny.
Johnny, évidemment ce n'est pas le vieux chanteur botoxé, idole de Madame Charik, non Johnny, il est gris métallisé, et il m'offre le monde... Mon ordi, mon second moi, mon fidèle...Alors je plonge dans les yeux numériques de Johnny, et les cloches s'envolent...
Et j'emmerde le lundi de Pâques.

Le samedi matin c'est royal. Grasse mat' et pain au chocolat au lit. J'ai beau être une intellectuelle, je lis des conneries, genre Be ou ce genre de daube, et je regarde vaguement dehors en me disant que je vais me lever, mais bof, ça me fait moyen envie, alors je mate à nouveau la mode de cet été. Perso je hais le jaune citron, mais Sonia va se transformer, fin mai, en canari, c'est à peu près sûr.
Sonia, je l'aime bien. Toutes les semaines elle tombe amoureuse d'un mec différent alors que moi, je ne tombe jamais, mais jamais, amoureuse.
D'abord l'amour, vous, vous savez ce que c'est?
Un truc mou comme un chewing-gum, qui vous colle au palais.
Bof.

                                                        


                                                    Je préfère les grasses mat'

Poissons morts

Ce soir ma mère m'a emmené manger une pizza. Genre c'est la fête, mais c'est juste que le frigo est aussi vide que l'estomac de Sonia lorsqu'elle a décidé qu'elle sortirait avec Jason Sploutch. La pizzeria du quartier, c'est toujours là où on atterrit avec ma mère, les soirs où un tordu se fait prescrire une pommade pour les genoux, parce que justement, il n'en peut plus d'avoir mal aux genoux, et précisément à l'heure du JT. La pizzeria du quartier, c'est comme un divorce qui aurait réussi. Pas gai gai, mais finalement assez réconfortant.J'ai pris une Sophia, celle avec les anchois -le type derrière moi a dit: mate la fille, elle a des poissons morts sur sa pizza- et j'ai regardé ma mère chipoter dans ses tagliatelles.
 Je me suis dit ça doit être ça, finalement, être adulte.
 Quelque chose comme un grand menu, entrée plat dessert, avec parfois, un parasol sur la Chantilly.

MOI JE PRÉFÈRE ZIGOMETTE